LE LAIT EN ALGERIE

La planète veut étancher sa soif de lait

Vincent Chatellier, économiste à l'Inra et spécialiste des questions laitières, est optimiste. Sur ce marché mondial, l'Ouest conserve de solides atouts. Entretien.

 


 

Les consommateurs occidentaux ne sont plus les seuls à raffoler des produits laitiers ?

Le monde a soif de lait pour au moins 30?ans ! L'humanité s'accroît de 80 millions d'habitants par an. Les Chinois, qui consomment 38 kg de lait par habitant et par an en seront à 60 kg en 2030. Mais ces pays - en Asie et aussi en Afrique - ne pourront s'auto-suffire, par manque de terres ou d'eau. Tous devront acheter encore plus de lait.

 

Qui va répondre à la soif de lait mondiale ?

Aucun bassin laitier ne peut relever seul ce challenge. Il y a, bien sûr, la Nouvelle-Zélande : elle exporte 90 % de son lait et assure déjà 28 % du commerce mondial. Avec ses coûts de production, les plus faibles au monde, sa culture exportatrice et la proximité des marchés asiatiques, elle restera dans le jeu et va encore maximiser ces atouts.

Les USA sont depuis peu, excédentaires en lait, mais il n'est pas sûr qu'ils pourront développer fortement leurs exportations au-delà du Mexique voisin à la démographie soutenue. L'Argentine a tout pour devenir un acteur conséquent, mais ce n'est pas, à ce jour, le choix de son gouvernement, qui taxe les exportations. Du coup, l'Europe, dont 7 % du lait s'exporte en 2012, a capacité à être plus présente sur le marché mondial.

 

Une carte à jouer pour la France ?

Oui, à condition de le faire, non pas dans une optique de « coups », mais de création de relations commerciales durables. Le marché intérieur de la France (qui exporte déjà 35 % de son lait) représente 350 kg par habitant et par an : il ne progressera plus. Il y a certes quelques places à prendre en Italie ou en Espagne, à la production en repli. Mais le marché russe, très demandeur, sera d'abord approvisionné par les pays du nord de l'Europe. La France doit donc chercher ailleurs des débouchés potentiels.

 

Comment les industriels laitiers et les producteurs peuvent-ils s'adapter à cette nouvelle donne ?

Les leaders, souvent privés, continueront probablement de miser sur leurs savoir-faire (y compris hors frontières) et leurs marques, sans forcément acheter plus de lait en France.

Les grandes coopératives, elles, tout en bétonnant leurs débouchés domestiques, doivent s'armer pour exporter plus, aujourd'hui et quand les Néo-Zélandais ralentiront. Elles doivent pour cela se doter d'outils optimisés et réactifs. Elles ne pourront le faire qu'en associant les producteurs aux projets et aux fruits de la croissance. L'avenir passe aussi par la co-construction de filières pérennes, avec leurs clients lointains. Avec eux, elles peuvent créer des sites industriels partagés. L'excellence de notre traçabilité crédibilise cette approche.

 

L'Ouest va rester un grand bassin laitier ?

Les atouts de l'Ouest sont réels, avec un coût du foncier plus bas qu'ailleurs, une production fourragère régulière, une agriculture sociétaire facilitant transmission et organisation du travail. Et puis un hectare en lait génère encore 3 à 4 fois plus de recettes qu'un hectare de céréales !

  

Propos recueillis par Gwenaël DEMONT

Source : http://www.entreprises.ouest-france.fr du 25.05.2013 



27/05/2013
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